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Je ne fais que passer

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Mes phrases se retrécissent et se terminent en points de suspension. J’avais la tête baissée sous la pluie quand le goudron s’est brutalement éclairé… Sans transition, l’irruption du clair dans l’obscur n’en était que plus belle. J’ai lu machinalement la pancarte d’un bar, qui annonçait fièrement “ici : cassoulet, whisky, ping pong”… J’aime ces détails saugrenus qui accrochent mon regard, ils me sortent de ma rêverie tout en me surprenant. Je plie, déplie, replie les futurs possibles au gré des de mes envies, au fond je ne souhaite que de l’imaginaire pour l’instant, peut-être. Les gens, parfois, n’ont rien de vivant en dehors de leur corps, celui qu’ils auront aussi à l’état de cadavre. C’est ce que je me disais face à cet homme raide et droit au regard lointain… En dépit du roulement du métro et des freinages, aucun tressaillement n’était visible, même ses cils ne battaient pas. J’ai pensé à ma mère qui remue sans cesse, et je l’ai trouvé rassurante dans sa nervosité, ses toussotements, ce surplus physique de vie en elle. Tous les vendredi, ce couple attend à mes côtés. Pendant dix à quinze minutes, ils sont séparés par une trentaine de centimètres et, sans se dire un mot, tels des étrangers, chacun fume sa cigarette. Dés que le bus apparaît sur la route, à la sortie d’un virage, ils se jettent l’un sur l’autre en s’embrassant férocement, au point de faire attendre le conducteur. Le phénomène, malgré sa répétition hebdomadaire, continue de me surprendre… Est-ce qu’ils ne se désirent qu’avant de se quitter ?

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