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au fil de la plume, ou de la flamme sur la mèche

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Le dessin représentait un éléphant assis dans une flaque d’essence, qui tenait dans sa trompe une allumette et s’apprêtait à la gratter du côté noirci du carton, alors j’ai dit “vous m’effrayez”, puis “vous vous trompez”. Il est vrai, cependant, que je me sens au bord de l’implosion. Agacé, il pose sa main sur ma cuisse et demande “qu’est-ce qui te stresse ?” Je fais des erreurs en enregistrant plusieurs fois le même livre, par distraction sans doute mais, pour ma défense, tous ces ouvrages se ressemblent finalement. J’aimerais bien faire exploser la parois, ou l’arbre qui cache la forêt, avoir une vision bien dégagée, sans fioriture, au risque de tout perdre […], mais j’interromps la bombe sans la désamorcer, en essayant d’éviter de la regarder. Néanmoins, au lieu d’écrire à propos des chats écrasés, je pourrais raconter l’instant de sérénité quand le soleil chauffait le carrelage du deuxième étage ; la pie que je commence à apprivoiser à défaut de pouvoir m’approcher des écureuils ; ou encore la façon dont j’ai eu envie de remercier le chauffeur du bus quand il a dit “certaines personnes ne savent pas que les nuages n’amènent pas toujours de l’eau”. J’ouvre la page d’inscription au concours puis la referme, comme je commence mes phrases sans les terminer, parce qu’où trouverais-je le courage d’apprendre scolairement de nouveau ou d’émettre un avis tranché ? La sortie de secours change de place sans cesse, et les ambitions que je fais miennes me sont dictées par les autres. De toute façon, mes journées se cantonnent à des impressions fugitives tant j’ai des difficultés à me détourner de mes soliloques inutiles. Pourtant je souris toute seule, par exemple face à ce vent qui se lève tous les jours entre midi et quinze heures en ce moment. En Provence, il a un nom : le Ponant, pour ce que j’en sais il ne traverse pas la région Rhône-Alpes, alors est-ce que je l’imagine ? […] Je prétends vouloir partir n’importe où, j’aimerais peut-être seulement effectuer quelques trajets dans le temps. Ce vent, donc, est désagréable parce qu’il refroidit mon visage – la chaleur étant le seul avantage des journées ensoleillées hivernales – mais il fait tomber les feuilles jaunes des arbres, c’est déjà ça. Après l’intermède venteux, je l’écoute, elle aussi, me dire que j’ai eu tort de ne pas mentir. Je n’ai pas eu le temps de lui expliquer qu’autrefois, nous ne nous confions pas nos difficultés afin de ne pas nous blesser mutuellement… Intériorisées, elles rampaient dans nos profondeurs respectives et, sans prévenir, finissaient par être régurgitées amèrement, méchamment. Désormais, il n’y a plus que de petites secousses, des mini tremblements de terre… Si notre relation en vaut la peine, ils seront encaissés. Tais-toi parce que tu ne sais pas tout ce que nous avons traversé avant de trouver la paix, une bibliothèque entière constituée de petits caractères dans des millions de pages ne saurait le résumer, c’est notre force et notre faiblesse aussi. Quand il dit “je ne t’en veux pas et ne t’en voudrais jamais, mais j’ai envie de pleurer, j’ai besoin de toi”, ce sont mes larmes qui coulent, de reconnaissance et d’affection […] Dans le bus, je dresse des listes de ce que je ne fais plus et de ce que je n’ai jamais fait auparavant… pour me réconforter, oublier cette sensation que je suis une route semblable, un aller-retour interminable, de l’aube à l’aurore. Mais il y a exactement trois minutes, j’ai lu “on va essayer de renouveler le désir, tu veux bien ?” et si mon “oui” avait été prononcé, sa force aurait fait explosé la ville entière.

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