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La nuit de la super lune du siècle, la saison sans rêves

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La nuit et le froid sont revenus s’enrouler autour des draps à la sonnerie du réveil. Alors recommencent les contorsions pour se vêtir sous la couette et la peur d’être happée par les courants d’air.

Sans l’odeur réconfortante des boissons chaudes et du pain grillé, sans la voix toujours enthousiaste du petit garçon qui raconte ses rêves dans la pièce voisine, sans la peur de la mort aussi, je resterais bien allongée jusqu’au lendemain, voire encore plus loin. Non pas pour dormir car je ne dors plus, je n’ai jamais vraiment dormi d’ailleurs, simplement pour écouter le temps et les routines s’écouler sans moi.

Dans ces matinées qui se travestissent en soirées, le corps de l’enfant disparaît petit à petit, sous les écharpes, manteaux, bonnets, gants et bottes. Les virées au parc se raréfient progressivement comme les feuilles sur les arbres et nous ressortons les jeux de société. Je m’étonne de jouer aux mikados, aux petits chevaux et au jeu de l’oie sans ressentir la moindre nostalgie.

Pendant qu’il est à l’école puis au centre de loisirs, les écorces de clémentine ou de mandarine jonchent mon bureau et laissent une pellicule parfumée sur mes doigts tandis que je tapote sur le clavier, à longueur de journées grises et humides. J’oublie toujours un mug vide que je retrouve le lendemain, le sachet de thé vert collé au fond de la tasse, ou trempant dans un fond de thé froid, en fonction de mon degré de concentration la veille.

Quand je regarde un peu ce qui se passe dans le monde autour de moi, parce que c’est nécessaire, je suis plutôt démoralisée. Les écrans me montrent un clown et sa poupée gonflable au sommet des Etats-Unis. Je me souviens de l’émotion de mes contacts lors de l’élection de Barack Obama et de cet ami qui m’écrivait : « cette jeune nation a encore beaucoup à apprendre à la vieille Europe. »

Des alertes enlèvements d’enfant passent sur Twitter et, toujours, c’est le mien que je vois. Je fais d’ailleurs une inquiétante fixation face au moindre fait divers impliquant des gamins. J’ai tellement peur pour l’avenir de ma petite canaille, de mon beau-gosse. Pendant ce temps, lui, il joue avec les expressions de son visage et le ton de sa voix devant le miroir, il se découvre en toute confiance en lui. J’aimerais qu’il puisse garder cette liberté et cette assurance, qu’on ne les lui retire pas avec la croissance et les traits de crayons tracés au-dessus de sa tête, sur le mur de sa chambre.

Cet automne, j’ai reçu une lettre qui commençait par « chère auteure… » Par féminisme, je préfère le terme « autrice », mais j’étais néanmoins émue. Dans un mois, l’une de mes nouvelles sera publiée dans une revue littéraire pour la première fois, c’est déjà ça…? Mais j’ai tant, tant, tant de projets inachevés que je ne suis pas sure de les terminer avant d’avoir cessé de respirer.

Je n’ai pas réellement envie de savoir ce qui adviendra demain et à dire vrai, c’est pénible, de ne plus faire confiance à grand chose, ni à soi, ni au monde environnant. Je ne sais ni où je vais ni où nous allons tous et cette incertitude m’oppresse trop souvent.

C’est la nuit de la super lune, celle qui n’a plus été aussi grosse et lumineuse depuis 1948. Cependant, par ma fenêtre, il n’y a qu’un ciel mauve et nuageux, poisseux d’humidité, sans étoiles ni lune. Un ciel sans intérêt, vraiment.

J’aimerais assez savoir comment m’endormir et être heureuse de me lever. Mais surtout ou avant tout, je voudrais retrouver un moyen de rêver.

2 commentaires sur “La nuit de la super lune du siècle, la saison sans rêves

  1. C’est probable puisque c’est plus ou moins la seule chose dont j’ai envie en ce moment.
    Je crois que plus les années passent et plus je trouve la période novembre-décembre-janvier pénible à vivre (décembre étant le mois le pire).

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