“Et plus dure sera la chute”, une phrase idiote qui vous étreint au mauvais moment, elle fait des aller-retours entre la gorge et le coeur. Je marche joyeusement sous la pluie, Björk dans les oreilles, le pas un peu trop dynamique suite à une absorbtion trop intense et trop rapide de café, je regarde les lumières se refléter dans les flaques… L’air frais me fait des mains délicatement bleutées et rend ma cigarette grésillante. Mes pensées s’interceptent : la masse d’informations accumulées pendant mes heures de cours, les fous-rire nerveux pendant la dernière heure avec ma copine de classe, les dernières phrases qu’Il m’a dite pendant les quelques minutes précédentes, notre conversation téléphonique d’une demi-heure en langage animalier et l’air scandalisée (ou empreint de pitié peut-être) de la petite vieille qui m’entendait miauler et imiter le chant du coq au téléphone… En rentrant, pour me réchauffer, je collerais mes doigs contre le ventre blanc et moelleux du chat en écoutant Stina Nordenstarm… Et soudain voilà, “et plus dure sera la chute”.

Lorsque tout allait mal, les gens me disaient “au moins, tu ne peux pas tomber plus bas”, j’y arrivais toujours malgré tout, le sol cachait de multiples trapes dans lesquelles je sautais à pieds joints. Il suffit d’avoir expérimenté une fois les sables mouvants pour s’attendre à les voir surgir, même dans l’asphalte la plus cimentée. Combien de temps va-t-il supporter mes attitudes excessives ? Il faut toujours que je rajoute du passionnel, de l’hystérique, dans les relations… Au lieu de fermer les portes, je les claque à la volée, je reviens même s’il n’y a pas eu de rappel et je rajoute une bonne couche de jalousie et de paranoïa quand il n’a prononcé qu’une phrase anodine. J’analyse le moindre mot, je trouve des sens cachés partout, je ressasse jusqu’à l’explosion. Puis je vois son regard ahuri et son expression d’incompréhension, et je me transforme en amoureuse douce et éperdue, digne des “meilleurs” romans de la collection Harlequin (je n’en ai jamais lu mais je suis sure que ça y ressemble). Je suis théâtrale jusqu’à l’obscénité.

J’aimerais bien être l’une des feuilles légères du clip “Is a woman” de Lambchop et faire partie de ce joli décor calme et lumineux. Mais, incapable de me laisser flotter jusqu’à la rive, il faut toujours que je m’épuise dans les contre-courants. Les doutes se reproduisent, il suffit d’en détecter un pour que ce soit l’escalade… Il y a ce sentiment d’être dépassée par les connaissances qu’ils exigent de moi, de ne pas être assez intelligente, de réussir par chance… La peur de l’après, de l’heure suivante, cette sensation qu’il va nécessairement arriver quelque chose de négatif, qui me pousserait tout droit tout au fond du puit obscur. Hier soir, je ne voulais pas dormir, j’étais persuadée que j’allais mourir dans mon sommeil dés que je fermerais les yeux, au moindre prémisse d’abandon de soi. Je me raisonne évidemment, je mets mon t-shirt wonder woman comme s’il s’agissait d’un bouclier, mais je sens que je n’effraie pas pour autant les menaces imaginaires.

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