Après plusieurs nuit sans rêve où je me réveillais avec cette sensation fausse mais néanmoins frustrante d’avoir clos mes paupières 5 minutes avant la sonnerie du réveil, j’ai enfin vu des images la nuit dernière. Je faisais des nœuds avec ses testicules et puis je lui tranchais le corps en deux. Il y avait des litres de sang et je me disais “ce n’est pas normal qu’il saigne autant alors qu’il n’a jamais su être humain”. Lorsque l’orage m’a ramené à la réalité, j’ai été très étonnée par ma propre violence. Je ne me pensais pas capable d’avoir des idées pareilles, même en rêve. Quand je pense à lui, un nombre invraisemblable d’insultes me vient instantanément à l’esprit. Cette haine est grotesque mais elle est positive malgré tout : au fur et à mesure qu’elle augmente, tous mes sentiments amoureux s’évaporent. Je concentre mon énergie rageuse sur mon travail.
Mettre seulement une heure à créer un site en intranet en configurant un logiciel libre alors que je n’ai jamais manié ni le php ni Mysql… Je ne m’en croyais pas capable. Passer des coups de téléphone à des inconnus me donne des crises d’angoisse d’habitude. Clic-cloc font mes talons sur le carrelage. Je “réunionne”, j’essaie de “diplomatiser”, sourire bonjour-ça-va je parle trop et trop vite, je fais du vent, je suis un courant d’air.
Je me dois d’être un courant d’air d’ailleurs, car si je m’immobilise ça recommence comme avant, à l’époque où tout me blessait : du fait divers dans le journal jusqu’à cette gamine qui hurle au téléphone “je vais prendre le métro et j’ai peur maman, j’ai peur d’entrer dans le métro, j’ai peur maman, ne raccroche pas maman, j’ai peur”. Dans le bus, un inconnu me chuchote brutalement dans l’oreille : “tu sais que tu as de l’argent dans le cerveau, réfléchis-y” avec l’air de quelqu’un qui te rend service en te transmettant un grand secret : un fou qui se pense lucide. Sur la route, un oiseau écrasé ; dans la bibliothèque, le cadavre d’une souris transpercée et sanguinolente. Mais ce sont mes propres tripes qui remuent et qui s’agitent…
(Pendant la semaine post rupture, j’ai eu envie de prendre un congé maladie pour rester blottie au fond de mon lit et passer mes journées à regarder le ciel par la fenêtre. Je l’aurais sans doute fait sans ce désagréable sentiment de “déjà-vécu”.)
“De toute façon, tu tomberas toujours sur des salauds” “Pourquoi tu me dis ça ? C’est cruel”. “C’est cruel mais c’est vrai”. Non. En fait tu n’es qu’un pauvre frustré. Au lieu d’être blessée par tes propos, j’aurais dû partir sans même prendre la peine de te répondre. Je te regarde te balancer dans le fauteuil à bascule et soudain je te trouve immonde. Je déteste ta voix, tes idées perverses, ta façon de t’énerver pour rien, ton intolérance vis à vis des gens… Malheureusement, j’ai déjà raté le dernier métro. Merde, voilà que je me mets à pleurer, je n’ai décidément plus aucun contrôle sur moi-même. “c’est ce mec qui te rend triste ?” Non, même pas en fait, ou alors indirectement. Je fais le deuil de mes espoirs passés, je pleure parce que je n’en finis pas de les enterrer et de détester celle qu’il m’avait fait devenir.
“Tu es obéissante et soumise”. En partant ce matin là, j’ai décidé de ne plus être gentille, obéissante, soumise, bonne poire en somme (être bonne poire : se faire avoir, se faire duper à cause d’une trop grande gentillesse). Et ça tombe bien car il y a une énorme poche pleine de venin là où se logeait ma mélancolie. Une boule de haine qui n’en finit pas de gonfler. J’ai les poings qui me démangent et de la méchanceté plein la bouche. Alors je fais le courant d’air. Désormais, tout individu qui prendrait le risque de se mettre en travers de mon chemin récolterait une bourrasque en forme de claque violemment imprimée sur le corps.
Où est-ce qu’elle a disparu, la Junko blasée et je-m’en-foutiste ? Je m’en étais débarrassée sans regret parce qu’il me l’avait demandé, mais j’ai vraiment besoin d’elle maintenant.
[Et dans ma tête, sans arrêt, j’entends la chanson Who do you think you are de Saint-Etienne.
Who am I ? I’m just a girl who only wants to try to do what’s right; I’ll never make you cry but you’re no good for me, and who do you think you are ? You tried to push me a bit too far, and every day sees another scar. Oh tell me, who do you think you are ? If you want me there, you gotta care! Oh tell me, who do you think you are, taking advantage of me this way ? Tell me, who do you think you are, hurting me more with the things you say ? It’s not fair, you don’t care. Who do you really think that you are ? Where are we ? (oh where are we ?) We’re at the cross roads and I just can’t see (just can’t see) which way to take to keep you here with me (here with me). The lights are changing, baby, who do you think you are ?]