Depuis l’entretien avec le psychologue à l’école, une phrase s’est gravée dans ma mémoire, un peu comme le refrain d’une chanson ou, peut-être, l’un des versets d’une prière.
La séance était terminée et le psy a demandé au petit : « tu sais ce que tu as envie de faire plus tard ? » Il n’est évidemment pas le premier adulte à lui poser cette question et il ne sera pas le dernier non plus. La précédente réponse du Boutchou était presque trop mignonne pour être sincère :
Cette fois-ci, après une phase de réflexion toute aussi longue, l’enfant a admis posément : « je ne sais pas encore ». Alors le psychologue lui a dit : « De toute façon, toi, tu as les capacités pour faire tout ce que tu veux dans la vie ».
Cette phrase m’a fait autant de bien qu’un verre d’eau fraîche un lendemain de cuite. Néanmoins, je me doute que dans le fond, ce n’est pas aussi simple. Déjà, encore faut-il savoir ce que l’on désire faire de sa vie.
Je repense à ma meilleure copine de fin de primaire-début collège. Brune, yeux marrons, corps élancé, moins de 15 ans, apprentie délinquante. J’ai fait mes toutes premières bêtises avec elle, de l’école buissonnière au vol à l’étalage. À « l’époque », elle rêvait de devenir caissière. Notons que c’est un objectif plus facile à atteindre que Président de la République. On s’est laissé tomber l’une l’autre, un rejet simultané et réciproque. J’étais trop sage pour elle, elle était trop incontrôlable pour moi. Et pourtant, je n’ai jamais été une Mary Ingalls, c’est dire que.
Elle m’a retrouvée sur FB il y a environ 3 ans et c’est avec joie que j’ai accepté sa requête d’amitié, heureuse de renouer avec elle. Maintenant, son métier consiste à aider les adolescents délinquants à se réinsérer dans la société. Autrement dit, elle est éducatrice spécialisée. Un sourire est resté durablement posé sur mes lèvres lorsque je l’ai appris. J’oscillais entre « hein ? Elle, éducatrice ?! » et « c’est sûr qu’elle sait ce que c’est, elle est même vraiment qualifiée pour ce job ».
Pour ma part, enfant, je rêvais surtout de notoriété. Comme je ne me voyais qu’un seul talent, l’écriture, je disais que je serai écrivain. En fait, j’affirmais aussi « ou comédienne », simplement parce que mes parents me répétaient : « arrête ton cinéma ! Arrête de jouer la comédie ! ». J’imaginais donc que j’avais du talent dans ce domaine-là. Néanmoins, écrivain était à la première place… pour être célèbre. Quant à la comédie, je pense qu’en réalité, je ne l’ai jamais jouée, même petite fille. J’ai toujours eu la larme et la colère faciles. Cela dit, à l’arrivée, je suis écrivain. Je veux dire que je vis de l’écriture… mais dans le plus parfait anonymat.
Des tours et détours de l’existence, avec ses aboutissements prévisibles et ironiques à la fois.
Et puis, il n’y a pas que le choix du métier. Il faut aussi être capable de semer les bons cailloux sur les sentiers, opter pour les croisements adéquats, revenir sur ses pas si nécessaire, faire attention au loup, remarquer l’éléphant dans son salon, etc. Bref, c’est assez compliqué. Et non, pouvoir ou même vouloir, ce n’est pas avoir, ce serait beaucoup trop facile sinon.
«Toi, tu as les capacités pour faire tout ce que tu veux dans la vie. »
Marilyn Monroe disait : « on ne m’a jamais dit que j’étais jolie quand j’étais petite fille. On devrait dire à toutes les petites filles qu’elles sont jolies, même si ce n’est pas vrai ».
Chère Norma Jean, on m’a beaucoup répété que j’étais une petite fille très jolie. Or, à chaque cil échoué sur ma joue, je souhaitais devenir intelligente. Personne ne me rendait service en m’affirmant que j’étais jolie ou, du moins, ce n’était pas ce que j’avais besoin d’entendre en ce temps-là.
En fait, je crois qu’on devrait toujours dire aux petites filles et aux petits garçons qu’ils ont les capacités pour faire tout ce qu’ils veulent dans la vie, même quand ce n’est pas vrai.
Cependant, en y repensant, l’enfant n’avait pas l’air très concerné par cette information. Je savais qu’il écoutait parce qu’il avait cessé de dessiner un pirate sur une île. Son crayon était suspendu, ses gestes interrompus. Néanmoins, il n’a pas réagi à cette nouvelle, il a dit : « ce que je comprends c’est que j’ai bien travaillé alors je vais pouvoir faire de la musique ». Oui, voilà, bon, d’accord. Le reste est sûrement un peu trop abstrait.
Et soudain, je me demande si ce ne sont pas les parents qui ont le plus besoin d’entendre cette prophétie à propos de leurs enfants. On rêve toujours d’un bel avenir pour nos gamins d’aujourd’hui, ces adultes de demain, y compris quand on ne sait pas trop quoi penser de sa propre vie.
« Toi, tu as les capacités pour faire tout ce que tu veux dans la vie ».
(…)
(J’ai beaucoup écouté cet album ces derniers jours.)
Je crois aussi que c’est aux parents que ça fait le plus de bien. Et heureusement. Que c’était bon cet âge où on était pas en partie défini(e)s et limité(e)s par une activité plus ou moins choisie.
Mais aller faire de la musique, ça c’est une promesse !
Je suis totalement d’accord avec toi. Cette phrase met l’accent, justement, sur l’étendue des possibles quand on a 6 ans et c’est aussi en cela qu’elle m’a fait cogiter.
Pour moi, la musique s’apparente généralement à une belle promesse, qu’on en fasse ou qu’on se contente de l’écouter.
Il est fantastique cet album de CADE. Il devrait séduire tous les amoureux d’Aldous Harding.
Je suis contente d’apprendre que tu l’aimes aussi. Cet album m’accompagne vraiment très agréablement dans toutes mes activités. D’Aldous Harding, je ne connais que l’album « Party », que j’aime beaucoup.
(Je modifie un petit peu mon commentaire parce qu’après réécoute et comparaison, je ne suis quand même pas convaincue par la ressemblance entre l’une et l’autre. Quoi qu’il en soit, l’album de CADE capte davantage mes oreilles sur la durée.)
C’est le deuxième article que tu écris depuis notre dernier gros échange, je me dis à chaque fois je vais y répondre par mail je n’y réponds pas parce que 24h dans
ma fatiguemes journées ; j’adore que tu te remettes à écrire ici, je suis frustrée de ce que je n’arrive pas à écrire un mail (il fait si chaud ici, l’orage a laissé derrière lui toute la chaleur écrasante, je me sens sonnée).(je n’avais rien de plus constructif à dire, note).
Ah, si. Tu me fais découvrir Cade, et c’est absolument magnifique !
Merci et tu sais, je comprends bien, le temps et moi avons aussi bien des difficultés à nous accorder.
Je te réponds alors que le tonnerre gronde après une journée d’une chaleur écrasante. Je dis ça mais je n’en ai pas trop souffert en réalité, dans mon bureau règne une pénombre fraîche été comme hiver.
Je ne sais pendant combien de temps je me remettrai à écrire ici. J’ai toujours l’espoir d’atteindre une régularité et dans le même temps, c’est difficile de trouver la motivation après une journée d’écriture pour autrui, quand il y a tant de bons livres à lire par ailleurs ou d’envies de s’oublier à la fin de la journée.
Si par le passé, j’avais créé un audioblog ailleurs, c’est notamment parce mes lecteurs lisaient les textes sans écouter les morceaux, à 2-3 exceptions près (oui David, je sais que toi si par exemple). J’adore faire découvrir et aimer les morceaux que je trouve moi-même magnifiques, alors merci ! 🙂
Souvent, sur les blogs, les articles se terminent par une petite question du genre : « Et vous… [insérer le thème de l’article] ? », généralement en gras. Je n’aime pas utiliser ce procédé moi-même. D’abord, j’ai l’impression que c’est « tricher » pour pousser les lecteurs à commenter. Ensuite, la plupart du temps, je ne vois justement aucun commentaire sous ces articles-là. Cependant, j’ai failli le faire. J’avais sincèrement envie de demander et de savoir :
Et vous, quelle est la phrase que vous auriez aimé entendre petit ou petite ? Ou quelle est la prophétie que vous aimeriez entendre au sujet de votre enfant ?
Sait-on jamais, si par hasard ça inspirait quelqu’un, toi ou un visiteur de passage…
Ton silence est assourdissant 😀
Alors pour répondre aux deux questions en une seule fois dans l’espérance (parce que sans espoir, le monde n’est que néant) que peut-être cela te donnera envie de commenter en retour : « On vous souhaite tout le bonheur du monde
Pour aujourd’hui, comme pour demain
Que votre soleil éclaircisse l’ombre
Qu’il brille d’amour au quotidien »
😉
Halala, si tu savais comme ça me démange de revenir ! Toutes les semaines, je me dis que je vais m’organiser de manière à trouver le temps de rédiger un article et malheureusement j’échoue. J’ai plein de textes de blogs dans ma tête et j’espère encore rompre ce silence bientôt.
Bon, je mentirais si je prétendais aimer cette chanson car pas du tout, mais ces réponses sont compréhensibles. Merci !
Soit dit en passant, je te souhaite une bonne année, celle qui correspond à tes attentes et objectifs, celle qui rend aussi la vie plus belle à ceux auxquels tu tiens (…) bref, une année avec suffisamment d’espoirs.